Institutions financières, parité, Haut Conseil des finances publiques et BCE…

André Gattolin est intervenu jeudi 22 novembre 2012 dans la discussion portant sur les conclusions de la commission mixte paritaire relative à la loi de programmation et de gouvernance des finances publiques. Seul le prononcé fait foi.

 

Madame la Présidente, Monsieur le Ministre, Mes chers collègues,

Le groupe écologiste du Sénat a unanimement voté en faveur de la loi qui nous occupe lors de son premier passage devant notre assemblée.

Le groupe écologiste votera à nouveau en sa faveur, ce soir, alors que nous examinons les conclusions de la Commission mixte paritaire qui s’est réunie à son propos le 8 novembre dernier.

L’essentiel a déjà été dit lors de notre précédente discussion et je serai donc bref.

Si les écologistes ont dès le départ choisi d’appuyer cette loi organique, c’est parce qu’elle découle d’une obligation légale suite à la ratification du Traité européen de stabilité, de coordination et de gouvernance en matière économique.

C’est aussi parce qu’en choisissant la voie d’une loi organique plutôt que d’une modification de la Constitution, le Président de la République et le gouvernement ont préservé la capacité des pouvoirs publics et du législateur à amender les dispositifs qu’elle met en place, si le besoin devait s’en faire sentir à l’avenir.

Vous le savez, les écologistes ne sont pas en parfait accord avec certains aspects de ces dispositifs. La « gouvernance » budgétaire nous semble ici trop étroitement conçue, trop étriquée.

Le retour très rapide à un déficit maximal égal à 3% du PIB nous semble brutal et de manquer un peu de réalisme.

Nous avons rappelé tout à l’heure, alors que débutait la discussion relative au projet de loi de finances pour l’année 2013, certaines de nos inquiétudes. Nous les avions aussi évoquées lors des débats relatives à cette loi.

Nous avions déposé plusieurs amendements qui visaient à préciser le rôle ou à améliorer le fonctionnement du Haut Conseil des finances publiques que cette loi institue.

Certains étaient de nature très technique et portaient par exemple sur les demandes d’explication et de transparence sur les hypothèses prises en compte par le Haut Conseil dans la formulation de ses avis.

D’autres étaient de nature plus politique et, osons le mot, d’inspiration plus citoyenne ; j’ai en tête la question de la composition du Haut Conseil des finances publiques que nous avions suggéré de rendre plus paritaire.

Sept de nos amendements avaient alors été adoptés au Sénat, quatre ont depuis été confirmés par la Commission mixte paritaire, dont celui sur la question de la parité hommes/femmes qui a pu, lors de la CMP, être nous amélioré notamment en l’élargissant à l’ensemble des membres du Haut conseil.

Je tiens à ce sujet à remercier tout particulièrement Monsieur le Rapporteur général de la Commission des finances, ma collègue Michèle André et tous les membres de la CMP qui ont contribué à cette très grande avancée.

Rien ne nous garantit encore la qualité des travaux de ce Haut conseil – seul l’avenir nous le dira ! – mais il est d’ores et déjà devenu un symbole, au niveau européen de l’instauration de la parité hommes-femmes dans un milieu de la finances jusqu-là terriblement rétif à la présence de femmes dans ses organes décisionnaires ou même simplement consultatifs.

La portée politique de cette loi n’en est évidemment que plus grande !

Je veux voir dans ce processus un signe très positif.

Je veux voir dans ce processus la preuve que nos chambres parlementaires, trop souvent et trop longtemps considérées comme des chambres d’enregistrement par les gouvernements passés, constituent bien plutôt des chambres de réflexion, d’innovation et d’avancées déterminantes sur le plan sociétal.

Nous n’insisterons jamais assez sur l’importance que revêtent pour nous et pour le débat citoyen le respect que le gouvernement accorde aux travaux du Parlement, et la bonne intelligence que les Parlementaires doivent mettre dans l’amélioration des propositions gouvernementales.

C’est le propre d’un régime politique à la fois sain et efficace et d’une démocratie riche et cohérente avec elle-même que d’agir comme le gouvernement et le parlement ont su agir à propos de ce texte.

Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, mes chers collègues,

Je ne résiste pas pour conclure à l’envie de revenir une dernière fois sur la dimension européenne de ce texte… pour évoquer le Conseil européen qui s’ouvre en ce moment-même.

Comme vous le savez sans doute, le Conseil européen doit examiner la nomination éventuelle au sein du Directoire de la Banque centrale européenne de Monsieur Yves Mersch, dont la candidature a été rejetée le 25 octobre dernier par le Parlement européen, lequel n’a malheureusement en la matière qu’une voix consultative.

La raison pour laquelle le Parlement européen a rejeté cette candidature se trouve dans l’absence totale de femmes au sein de ce directoire, et plus largement au sein des instances dirigeantes des institutions économiques et financières européennes.

Une absence qui scandalise d’ailleurs bien au-delà du Parlement européen puisque près de 250 parlementaires nationaux, italiens, allemands, espagnols ou français, dont 55 parlementaires français issus de tous les groupes de cette assemblée, ont adressé ces derniers jours un appel au Président Van Rompuy pour l’alerter sur cette situation.

J’ai moi-même écrit aujourd’hui avec Catherine Tasca, au Président de la République pour que la France agisse en conséquence :

–    soit en refusant dès la candidature de Monsieur Mersch,

–    soit en promouvant la nomination d’une femme à la tête de la supervision bancaire européenne.

Les multiples plafonds de verre qui continuent de contraindre nos sociétés et empêche la parité hommes/femmes d’être effective dans tous les grands champs de la vie publique doivent tomber.

C’est notre devoir démocratique de saisir toutes les opportunités qui se présentent à nous pour œuvrer dans ce sens. Nous avons su le faire avec cette loi en France. L’Europe doit savoir le faire, dès à présent, lors de la tenue de l’actuel Conseil européen.

Je vous remercie.