Statut économique de la Chine : 350 000 emplois sur la sellette

> Vidéo de la question d’André Gattolin à Harlem Désir
La transcription de la question d’actualité au gouvernement :
Ma question s’adresse à M. le secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes.
Monsieur le secrétaire d’État, lorsque la Chine a rejoint l’Organisation mondiale du commerce en 2001, son adhésion s’est faite sous le statut très particulier d’économie non marchande, permettant notamment à ses partenaires commerciaux de se protéger du dumping par l’application de pénalités douanières.
Malgré une relative libéralisation, le dumping chinois demeure une réalité, dans les domaines social, économique et fiscal.

Après quinze ans d’application, le statut non marchand du pays à l’OMC est susceptible d’expirer en décembre 2016 et la Chine se fait aujourd’hui extrêmement pressante pour obtenir celui, plus favorable, d’économie marchande.

Or les incidences économiques d’un tel changement pour la France, comme pour l’Europe, seraient considérables et très risquées.

Une récente étude de l’Economic Policy Institute de Washington a en effet évalué que le risque de perte d’emplois en France serait de l’ordre de 350 000 entre 2017 et 2020.

Quant à ceux qui croient aujourd’hui en une véritable libéralisation du marché chinois, on peut leur rappeler que dans l’indice de liberté économique calculé par le think tank américain Heritage Foundation, la Chine n’était située en 2014 qu’au 137è rang mondial, derrière le Cameroun et tout juste devant le Liberia.

Ma question, monsieur le secrétaire d’État, est la suivante : quelle est la position de la France sur ce possible changement de statut de la Chine et comment compte-t-elle peser dans cette discussion, ô combien importante ?

Car de toute évidence, ce sera la Commission européenne qui disposera du mandat de négociation. Alors ne risque-t-on pas, monsieur le secrétaire d’État, si la France et ses partenaires européens n’adoptent pas au préalable une position commune claire sur le sujet, de se retrouver dans la même impasse que celle qui prévaut actuellement dans les négociations du Transatlantic Trade and Investment Partnership ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.

M. Harlem Désir, secrétaire d’État auprès du ministre des affaires étrangères et du développement international, chargé des affaires européennes. Monsieur le sénateur, la Chine est en effet l’une des dernières grandes économies avoir rejoint l’Organisation mondiale du commerce, en 2001.

Le protocole d’accession de ce pays à l’OMC a prévu que celui-ci était considéré comme une économie en transition.

Ce statut autorise actuellement l’application de droits de douane reconstruits qui permettent de prendre en compte les distorsions de concurrence à l’entrée du marché européen et de protéger une série de secteurs industriels européens dans le cadre des instruments européens anti-dumping.

L’application de ces droits est actuellement fondée sur une analyse de plusieurs critères techniques qui permettent d’apprécier si les prix pratiqués en Chine sont conformes au fonctionnement normal d’un marché.

Le protocole d’accession de la Chine prévoit des dispositions concernant le passage au statut d’économie de marché. Cette question devra donc être examinée le moment venu au sein de l’Union européenne par l’ensemble des États membres et la Commission européenne comme elle le sera par les principaux partenaires commerciaux de la Chine au sein de l’OMC.

Vous évoquez également une étude de l’Economic Policy Institut de Washington publiée le 18 septembre. Je note que la Commission européenne, par la voix du porte-parole de la direction générale au commerce, a indiqué qu’elle allait analyser cette contribution comme nous le ferons pour ce qui nous concerne.

Nous sommes naturellement très attentifs aux conséquences industrielles de ces sujets ; c’est pourquoi nous analysons très minutieusement tous les tenants et aboutissants de ce dossier, sur les plans tant juridique, économique, industriel que commercial.

M. le président. La parole est à M. André Gattolin, pour la réplique.

M. André Gattolin. Je remercie M. le secrétaire d’État de sa réponse. Je le répète : il est nécessaire que nous travaillions tous ensemble sur cette question. M’exprimant sous la bienveillante attention du président du Sénat, j’ajoute qu’il serait également important que notre Haute Assemblée, et plus généralement le Parlement, soit informée et débatte de cette question pour qu’on ne se retrouve pas une fois de plus dans la situation que nous avons connue lors des négociations – d’une transparence plus que discutable – engagées avec les États-Unis par la Commission européenne.

> Extrait du compte-rendu intégral des débats